La lutte sera longue et se terminera le même jour qu'elle a commencé
La famille Falcone se fait décimer pendant qu'Harvey Dent essaye tant bien que mal de donner une justice légale comparé à celle de Batman...
En 1996, une énième oeuvre de légende apparaît dans l'anthologie Batman. Cette fois-ci, ce n'est ni Frank Miller, ni Alan Moore et encore moins Grant Morisson (l'auteur florissant de la série depuis quelques années). Jeph Loeb et Tim Sale, futurs collaborateurs sur la série Heroes, signent Un long Halloween, saga cruciale et véritable inspiration pour David S Goyer et les Nolan sur Batman Begins et surtout The Dark Knight. L'action se déroule sur un an (d'Halloween au 31 octobre) et dans les jeunes années de Batman, bien après Year One de Miller étant donné que le Chevalier Noir a déjà affronté le Joker, Catwoman, Solomon Grundy, l'Epouvantail, l'Homme mystère, Poison Ivy et l'Homme au calendrier. Des méchants évidemment emblématiques et dignes de ce nom ou pas (l'Homme au calendrier et Salomon Grundy ne sont pas vraiment intéressants mais assez marquants pour apparaître souvent dans les différents médias).
Le graphic novel tourne autour du trio Batman- Harvey Dent- Jim Gordon, soit les tenants de la justice à Gotham: le vigilante, l'avocat et le commisaire de police. Dent est encore à ce stade là un avocat brillant cherchant à mettre à mal la pègre de Gotham par les moyens les plus légaux qui soit. Le problème étant que plus l'enquête continue, plus le bonhomme s'obstine et risque de perdre pied. C'est aussi un homme ambitieux, vivant pour sa femme. Bruce Wayne n'est pas en reste, se retrouvant piéger par Poison Ivy (travaillant en fait pour Falcone) et le traumatisant devant la tombe de ses parents. Plus encore, Loeb explore les réelles déductions de l'Homme chauve-souris au même titre que celle du spectateur. Bruce Wayne est donc un être faillable comme tous et dans sa quête du tueur de mafieux, il va avoir différentes possibilités, ce qui ne le tourne pas à son avantage.
Soit il s'agit d'un membre de la pègre, soit Dent est passé du côté obscur de la justice, soit c'est un autre. Sauf que les soupçons vont vers l'avocat. Ce dernier change tellement de comportement que le personnage devient trouble. Le drame qui s'en suivra ne fera que décupler ce changement de personnalité. Mais le twist final que je ne vous dévoilerais certainement pas foutra en l'air toutes vos suppositions précédantes. Gordon n'est pas trop utilisé comparé à ses compagnons et sert en grande partie de médiateur entre le Dark Knight et le Chevalier Blanc. Il connait aussi bien les deux et pataugent aussi dans l'affaire. Même la mafia ne sait plus quoi faire face à cette vague de meurtre sans précédant. On comprend mieux pourquoi Nolan a pris Un long Halloween comme toile de fond. Le dessin simple de Tim Sale renforce ce côté chaotique avec un minimum de couleurs.
On se croirait presque dans un polar de la grande époque. Une atmosphère poisseuse qui sied à merveille à ce Long Halloween, mettant à rude épreuve aussi bien les bons que les mauvais. Pour tuer des gens, Falcone et Maroni sont des experts mais quand leur clans sont attaqués, évidemment il n'y a plus personne. Un portrait bien loin des gros durs d'origine. Le Joker est évidemment présent, toujours là pour laisser sa trace à l'édifice meurtrier. Néanmoins, il ne fait office que de second-rôle. Reste que son sourire n'a jamais été aussi affreux que par le crayon de Tim Sale. Catwoman fait office d'aide pour Batman et non de méchante. De toutes manières, au fil des histoires, Batman cessera de lui chercher des noises et Selina Kyle deviendra une de ses multiples amantes. C'est le cas évidemment ici. C'est elle aussi qui le sauve de l'emprise destructrice de Poison Ivy.
Une oeuvre passionnante basé sur le trio de justiciers et qui révèle les parts d'ombre de chaque camp.