La vengeance vient des hautes plaines
Un homme mystérieux arrive dans une ville dont les habitants semblent hantés par un houleux souvenir...
Dans les années 70, Clint Eastwood s'impose en vraie star ayant même sa franchise (les Dirty Harry). Pour rendre hommage aux travaux qui l'ont lancé (la série Rawhide comme de la Trilogie du dollar), le grand Clint se lance dans la réalisation de western. Le premier des cinq de sa carrière (le percutant Josey Wales hors-la-loi, Bronco Billy, le christique Pale Rider et l'adieu définitif Impitoyable suivront) et probablement mon préféré du cinéaste. Conscient qu'une de ses réalisations ne peut marcher sans sa présence (avant Mystic River ça l'était et le premier à l'avoir été, soit Breezy, avait été un flop), il prend le rôle principal. A noter que l'on retrouve également Billy Curtis et Verna Bloom. A vrai dire, L'homme des hautes plaines mélange fantastique et western. L'aura du personnage d'Eastwood s'avère assez étrange, l'acteur apparaissant dès l'ouverture comme une sorte de fantôme de l'Ouest américain.
C'est peut être pour cela que les autres ne le reconnaissent pas ou passe leur chemin volontairement. La scène où il se fait tiré dessus par la bonne femme qu'il s'est tapé dans la grange en est également la preuve. Aucune balle ne l'atteigne, pourtant il est désarmé et dans une baignoire. Une cible évidente et pourtant... Si Eastwood incarne un esprit, il est particulièrement vengeur. Le réalisateur nous asomme avec la même séquence de flashback, mais à chaque fois des points de vue différents. Une séquenc parmi les plus violentes du cinéma d'Eastwood, tout en restant poignante. On pense alors à certains de ses classiques qui suivront (le lynchage d'Eastwood dans Impitoyable, le dernier combat de boxe de Maggie dans Million Dollar Baby).
Hommage à un ami.
On comprend pourquoi le fantôme veut se venger des villageois. Pour cela, il s'impose comme un tueur implacable voire impitoyable (tiens donc!) et se retrouvant avec les pleins pouvoirs (encore un jeu de mots involontaire!). L'occasion pour lui de ridiculiser l'hôtellier (un homme ayant soi-disant des valeurs mais laissant un homme se faire fouetter à mort pour de l'argent), le maire, le shérif, la garce ou le prêtre qui ont laissé faire ce massacre. Résultats? Le shérif et le maire virent au profit du nain détesté, un viol plus ou moins consenti (après qu'elle lui tire dessus, Clint sort un bon "C'est seulement maintenant qu'elle vient? Elle n'a pas dû si détester que ça!"), l'hôtel explose et les clients vont chez le prêtre, obligé sinon il perdra ses fidèles.
Des personnages aussi sympathiques étaient-ils au début qu'ils ne le sont plus du tout au fur et à mesure que le film continue. Une humiliation voulue et dont le paroxisme arrive quand Clint se tape l'hôtelière ("Je sais très bien que vous me désirez" qu'il dit avant de lui faire l'amour!). Arrive alors les bandits dont veulent se débarasser les habitants mais qu'ils avaient autrefois engagé pour taper sur le fantôme. Une hypocrisie constante que je vous dis. Ils n'arriveront que dans les dernières minutes, véritable apothéose fouettée et brûlante. La fin reste néanmoins ambigue selon les doublages français et américain, ce qui peut présenter une réelle incompréhension. Dans la VO, il semblerait que Clint évoque son caractère fantômatique, laissant une part de suspence.
En VF, il dit que ce serait son frère qui a été torturé et tué alors qu'il se fait enterrer. Une confusion certaine et qui ne serait pas unique à la France, plusieurs doublages ayant mal interprété la fin originale. L'humour comme toujours chez le grand Clint s'avère très présent, malgré ce certain rapport avec la violence. Clint donne lieu à des pics virulentes et badass telles qu'on les aime. Un cynisme dont on ne se lasse pas et bien avenant vu le sujet particulièrement violent et vengeur. Eastwood se révèle donc aussi charismatique que drôlatique, ce qui n'est pas mince affaire pour celui que l'on surnommait autrefois Dirty Harry. Les autres acteurs s'avèrent excellent en particulier Curtis, nain détesté de tous car sait trop de choses.
Un des tout meilleurs westerns du grand Clint voire le meilleur, où ce dernier incarne la vengeance dans tout ce qu'il y a de plus jouissif.