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  • Sur ce blog, je vous parlerais de cinéma (plus de 2500 films cultes comme navets abominables, ainsi que son actualité), de séries, de bandes dessinés (mangas, comics ou franco-belge), de jeux vidéo et de rock!
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24 janvier 2014

Miyazaki: naissance d'un artiste

Après m'être attaqué à l'imagerie de Walt Disney, à la filmographie de Steven Spielberg et à l'arlésienne Dune, voilà que Borat s'attaque au senseï Hayao Miyazaki. L'occasion de revenir sur une carrière bien remplie qui aura fait fructifier le cinéma d'animation japonais au même titre que ses poursuivants (Katsuhiro Otomo ou Satoshi Kon pour ne citer qu'eux) suite à la sortie de son petit dernier Le vent se lève. Ce dossier sera en trois volets, le premier allant de ses débuts à la création du Studio Ghibli.

  • Débuts entre télévision et projet avorté

Hayao Miyazaki naît en 1941 en pleine Seconde Guerre Mondiale avec un père directeur de l'entreprise familiale basée sur l'aéronautique, la Miyazaki Airplane. Sa passion pour les avions est alors toute trouvée, l'animation ne venant seulement qu'après avoir vu Le serpent blanc (Yabushita Taiji, 1958) au lycée ainsi que par sa fascination pour Osamu Tezuka (mangaka à la fois par l'écriture et le dessin, créateur d'Astro Boy notamment). Par ailleurs, son enfance est particulièrement marquée par la tuberculose que subit sa mère. Un aspect familial qui reviendra par deux fois dans sa filmographie, tout d'abord dans Mon voisin Totoro (1988), puis dans son dernier film Le vent se lève (2013). Suivant des études d'économie, il est engagé à la Toei (pour vous donnez une idée, ce sont les producteurs des séries Dragon Ball ou Les Chevaliers du Zodiaque) où il rencontre Isao Takahata (son collègue privilégié de toujours) et sa femme Akemi Ota. Il est animateur sur le film de son collègue Takahata Horus, prince du soleil en 1968 (qui ne sortira chez nous qu'en 2004), avant de quitter la Toei en 1971. 1 C'est à ce moment-là qu'il envisage de donner naissance à son premier film, une adaptation de Fifi Brindacier, la fameuse héroïne pouvant soulever un cheval d'une seule main et vivant seule dans une maison bien trop grande pour ses voisins.

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Concept-art pour le projet Fifi Brindacier. 

Très attiré par le projet, Miyazaki fera son premier voyage à l'étranger en allant sur les terres de l'auteur Astrid Lindgren en Suède, où il fait de nombreux croquis du Port de Visby et de l'île de Gotland, où a été tourné la série live de 1969. Une rencontre est faites entre l'auteur, le futur réalisateur et Takahata, mais Lindgren retire rapidement son autorisation pour le projet animée, semblant vouloir tout contrôler. Le projet est alors jeté aux oubliettes, Lindgren préférant laisser passer différentes adaptations dont personne ne se souviendra, dont une américaine sortie en 1988 nommée par deux fois aux Razzies Awards! Reste que ce projet aura inspiré le réalisateur pour plusieurs projets aux décors très européens, Kiki la petite sorcière (1989) et Porco Rosso (1992) en tête. 2 Par la suite sous l'égide de A-Pro, il scénarise les petits films Panda Petit Panda (1973) que réalise Takahata également et travaille particulièrement sur deux séries animées. La première est Conan, le fils du futur comportant vingt-six épisodes (1978). On y retrouve plusieurs thèmes phares du réalisateur, que ce soit l'écologie ou les erreurs humaines. Ainsi, une troisième Guerre Mondiale a dévasté la Terre, les continents finissant majoritairement sous l'eau. C'est dans ce monde que Conan vit et découvre une jeune fille dont les secrets pourraient être mis à mal par un personnage souhaitant les utiliser afin de recommencer la guerre. 

Conan, le fils du futur : Affiche

Sous plusieurs aspects, cette série préfigure Le château dans le ciel (1986), Conan pouvant être assimilé à Pazu, la jeune Lana à Sheeta et le machiavélique Lepka à Muska. La seconde n'est autre que l'adaptation du manga Lupin III (Monkey Punch, 1967-69). Soit les aventures du petit-fils d'Arsène, tantôt séducteur, tantôt braqueur avec une bande systématique formée par le franc-tireur Jigen, le sabreur Goemon, la malicieuse Magali et qui doit toujours se coltiner l'agent d'interpol Lacogne, gimmick comique merveilleux qui fait le sel de la saga. En France, ce personnage culte est appelé Edgar de la cambriole ou Rupan III (tout dépend des éditeurs) pour des raisons évidentes de droits. Si Miyazaki réalise quelques épisodes de la série, il réalise surtout le second long-métrage de la série (initialement prévu pour son accolyte Yasuo Otsuka), lui permettant d'entrer définitivement dans la cour des grands. Le château de Cagliostro (1979) est certes l'un des nombreux films ou téléfilms d'une très grosse franchise (on ne les compte plus), mais c'est déjà un coup de maître pour l'ami Miyazaki. Malgré le cahier des charges (faire intervenir tous les héros phares de la saga et garder l'aspect comique à la limite du cartoon parfois), Miyazaki signe un pur film d'aventure comme on en voit rarement dans le cinéma d'animation. 

Le Château de Cagliostro : photo Hayao Miyazaki

Les tribulations entre Lupin et Lacogne sont un vrai délice, les deux cocos allant même jusqu'à s'allier pour quelques péripéties face à un comte sans scrupule. Idem pour les péripéties s'alignant au point de donner lieu à une sorte de montagnes-russes jouissive. On retiendra par exemple la course-poursuite cartoonesque dans la montagne ou les infiltrations déguisées de Lupin. On reconnaît tout de suite le style de Miyazaki, notamment au niveau de l'architecture prononcée du château en titre. Si le film sort avec succès en 1979, il peinera à débarquer en France (comme les trois quarts des oeuvres antérieures à Princesse Mononoké). Il sortira même avec trois doublages différents et sous différents titres. En 1983, Adès Video le diffuse uniquement en VHS sous le titre Vidocq contre Cagliostro, Lupin finissant avec le patronyme du célèbre détective français. L'éditeur Manga diffusera ensuite le film sous son titre original, mais en changeant une nouvelle fois le doublage et en remplaçant Lupin par Wolf, ce qui est déjà un peu moins débile que le précédent choix. 

19767896

Enfin, dans la foulée de la sortie des séries, des films et des téléfilms sous son égide, IDP avait diffusé en DVD le film avec un nouveau doublage, où l'on retrouvait notamment Philippe Peythieu pour la voix de Jigen (rôle qu'il a régulièrement repris) et Jacques Frantz dans le rôle du méchant. Il est ressorti en BR il y a quelques années sous l'égide de Kaze, perdant par ailleurs les bonus de l'édition IDP, Kaze étant du genre à laisser tomber tout ce qui est bonus, tout en gardant un prix identique ! Par ailleurs, Miyazaki signera aussi six épisodes pour Sherlock Holmes (1981), série animée où les héros de Conan Doyle sont transformés en animaux. Sherlock se retrouve par exemple en renard et Watson en chien. Une bonne alternative à Basil détective privé (Ron Clements, John Musker, 1986) produit par les studios Disney. Une série plutôt plaisante où il affirme encore un goût certain pour l'Europe. 

Sherlock Holmes : Affiche

  • Nausicaä de la vallée du vent (1982-94) : Récit d'une aventure de douze ans

Nausicaä de la vallée du vent : affiche Hayao Miyazaki, Tomoko Kida

Beaucoup croient que Nausicaä de la vallée du vent est une oeuvre des studios Ghibli. Pourtant, elle sort hors contexte et ce même si les bases du futur studio se feront au sein de cette aventure. A l'origine, il ne s'agit même pas d'un film, mais d'un manga écrit et dessiné par Hayao Miyazaki publié entre 1982 et 1994. Le film n'étant pas encore sorti en France à l'époque où votre cher Borat a réellement découvert Miyazaki (Mon voisin Totoro en VHS et Princesse Mononoké au cinéma),  il avait donc privilégié le manga. Soit sept volumes ardus avec un grand nombre de dialogues difficiles, au point d'avoir peur d'une adaptation. Pas que le manga ne soit pas beau, ni intéressant, mais le langage est si particulier qu'il est rebutant. Néanmoins, cela passe beaucoup mieux en film. Nausicaä n'a pourtant pas eu une production facile, compte tenu du contexte. A ce moment, Miyazaki se voit refuser plusieurs histoires à produire au cinéma par le magazine Animage, cofondé par Toshio Suzuki futur producteur historique du cinéaste. Voyant que le cinéma lui tourne le dos, il se met alors à écrire cette histoire de jeune princesse proche de la nature et faisant face à une guerre sans merci entre les hommes et la nature. Les premiers déciment la seconde pour pouvoir plus s'exposer et imposer leur pouvoir.

Nausicaä de la vallée du vent : photo Hayao Miyazaki

Parmi ses références, Miyazaki s'inspire du conte La princesse qui aime les insectes (ce qui caractérise le fait que Nausicaä prend la défense des omus, ces insectes qui menacent tant les hommes) ou encore de Dune de Frank Herbert (on pense à l'aspect quasi-désertique de la Terre et notamment un certain air irrespirable à certains endroits limites). 1 L'histoire s'avère foisonnante et permet d'entrevoir certains aspects phares de la filmographie du réalisateur, plus que sur Le château de Cagliostro. On le remarque par la virulence du propos qui sera plus ou moins repris dans Princesse Mononoké (l'Homme est incapable de vivre avec son environnement et n'hésite pas à le détruire afin d'asseoir son pouvoir; la réaction des omus fous de rage qui seront transposés en sanglier) et évidemment dans l'aéronautique. Miyazaki se fait un plaisir avec les différents vaisseaux qui parsèment ses dessins. C'est aussi avec Nausicaä que Miyazaki impose le rôle de la femme forte au centre de l'intrigue en mettant en ligne de mire deux figures ne se correspondant pas. D'un côté, nous avons la princesse proche de son peuple au point de devoir faire des sacrifices afin de le sauvegarder.

Nausicaä de la vallée du vent : photo Hayao Miyazaki, Tomoko Kida

De plus, ce n'est encore qu'une enfant (tout du moins une adolescente encore non préparée à un conflit qui n'est pas le sien), soit le contraire de Kushana, fille un peu plus mure et prenant le pouvoir avec une férocité parfois extrême. Une sorte de Dame Eboshi avant l'heure et tout aussi ambitieuse. Au vue du succès progressif du manga, Miyazaki lance l'affaire au cinéma en association avec les studios Topcraft, succès sans précédant de l'année 1984 et le producteur Yosuyoshi Tokuma de créer le Studio Ghibli avec Miyazaki et Takahata à sa tête. 3 Une nouvelle étape pour le cinéaste qui bénéficie de ses propres moyens afin de s'imposer dans le milieu. Néanmoins, comme dit ci-dessus, la distribution du film dans sa version totale fut quelque peu tardive en raison d'une distribution dont l'ami Roger Corman a le secret. 4 Nommé Le vaisseau fantôme et surtout La princesse des étoiles (évidemment, on vous laisse imaginer le rapport avec l'oeuvre de George Lucas), Nausicaä passe réellement à la casserole sous l'égide de New World Pictures. Un constat à l'image de films soviétiques ou asiatiques remixés avec des rushs américains, histoire de mieux les vendre aux USA. Le film y perd jusqu'à vingt-trois minutes de métrage sur les cent-seize totales.

Nausicaä de la vallée du vent : photo Hayao Miyazaki

Nausicaä laisse sa place à Zandra, les omus deviennent des "gorgones géantes" et l'action est largement privilégiée par l'ami Roger. Le générique original passe à la casserole et évidemment on a droit à la bonne vieille voix-off pour que ces bons vieux américains ne se perdent pas devant des scènes trop lentes et pouvant les ennuyer! Il leur faut du dynamisme! Autant dire que ce n'est pas avec des images contemplatives que n'aurait pas renier un certain Terrence Malick que cela va les aider. Ainsi plusieurs plans sont supprimés afin de conserver un certain dynamisme à l'image de la séquence de la pluie de spores, de la scène dans la chambre remplie de plantes de Nausicaä, des scènes de rêves et le passage avant la bataille finale. L'arrivée de Yupa est écourtée, le village de la vallée du vent perd en description et celle de la grotte avec le jeune soldat est diminuée. Pas étonnant qu'après un tel saccage, Miyazaki et Takahata ont arrêté toute distribution à l'étranger durant longtemps, certains films ne nous parvenant qu'au détour des années 2000 au même titre que Nausicaä, qui sera le dernier film de Miyazaki antérieur à Princesse Mononoké à parvenir en France. 


1 Anecdotes issues du Mad Movies numéro 270 (janvier 2014).

2 Anecdotes issues de Les plus grands films que vous ne verrez jamais de Simon Braund.

3 http://www.allocine.fr/film/fichefilm-40132/secrets-tournage/

4 Anecdotes issues du Mad Movies numéro 228 (mars 2010).

Autres sources: 

  • http://fr.wikipedia.org/wiki/Hayao_miyazaki; 
  • http://fr.wikipedia.org/wiki/Conan,_le_fils_du_futur; 
  • http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_ch%C3%A2teau_de_cagliostro
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Commentaires
2
Je n'ai vu aucun Miyazaki, mais je me souviens très bien de Lupin III, dont je garde de beaux souvenirs.
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A
excellent dossier pour cet immense artiste qui a bcp apporté dans l'univers de l'animation
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