La revanche du Geek
Seth, Evan et Fogell trouvent un moyen d'entrer dans une soirée hype en devenant les "hommes à alcool" de la soirée. Le début des ennuis...
Superbad (Greg Mottola, 2007) est un cas à part, car c'est un film où votre cher Borat est passé d'un jugement positif à négatif pour ensuite revenir au positif! Surréaliste vous dites chers lecteurs? Peut être bien. En tous cas, il avait apprécié le film lors de sa sortie au cinéma, se faisant petit à petit au cinéma de Judd Apatow, producteur de la chose et déjà réalisateur de deux films (Superbad a suivi la sortie française de Knocked up). Puis en le revoyant plusieurs fois en DVD, il a commencé à l'apprécier beaucoup moins en raison de ses vannes pour le moins grasses. Puis vint la lecture d'un numéro de Rockyrama où les articles étaient assez intéressants pour y revenir. Votre interlocuteur a retrouvé le plaisir de sa vision en salle, tout en le voyant pour la première fois en VO histoire de profiter pleinement des dialogues. Il faut dire que plus qu'un film sur des adolescents partant pour l'université, on est à la limite du campus movie. Le genre où les universitaires font la fête sans se préoccuper de l'école. On n'entendra pas les parents gueuler parce que leurs gosses découchent, le lycée est surtout une récréation avec cours de cuisine gourmand et croquant et la plupart du film repose sur "vont-ils trouver de l'alcool pour aller à la fête?". Cette dernière n'est qu'un prétexte pour une aventure délirante allant à droite et à gauche.
Eux ce sont trois des futurs stars de la scène ricaine: Michael Cera, propulsé amant d'Ellen Page et inimitable Scott Pilgrim; Jonah Hill compère de Leonardo Dicaprio dans Le loup de Wall Street (Martin Scorsese, 2014); et Christopher Mintz Platz nemesis de Kick Ass. Mais loin de la gloire en attente, ce sont trois branquignols accumulant bourdes sur bourdes, allant des règles sur le pantalon au chanteur du dimanche. Néanmoins, Mottola et les scénaristes Seth Rogen (également présent devant la caméra) et Evan Goldberg segmentent le tout: il y aura les aventures de Seth et Evan (Hill et Cera); de l'autre celles de McLovin (Mintz Platz), même si elles sont liées. Seth et Evan apparaissent comme les clichés même des adolescents: le petit gros complexé mais grande gueule et le grand mince toujours à l'écart. En gros: des exclus purs et durs. Mais leur heure de gloire va arriver, tout du moins ils y croient dur comme fer, peut être pas de la meilleure manière. L'un voudrait conclure (on va opter pour ce mot car comme tout Jean-Claude Dusse qui se respecte, Seth est très porté sur la chose) avec Jules (Emma Stone dont c'est le premier gros film); quand l'autre est amoureux fou de Becca (Martha MacIsaac) et voit ici un beau moyen de le lui faire savoir. Le bourrin qui y croit et le timide qui veut sortir du silence.
Leur objectif sera d'aller à cette soirée, car c'est le moment de la dernière chance avant l'université. Mais surtout le trio de
réalisateur-scénaristes jouent beaucoup sur la bromance entre ces deux potes qui vont bientôt se quitter et n'arrêtent pas de s'engueuler durant le film. Le final apparaîtra comme le point de non-retour, là où les chemins se séparent, où la vie continue parfois l'un sans l'autre sans jamais gâcher les sentiments. D'un autre côté, McLovin a un destin différent. Considéré comme un tocard par ses camarades (surtout Seth, Evan étant plus réservé sur la question), Fogell peut s'apparenter au Geek, ce personnage culte de Sixteen Candles (John Hughes, 1984) incarné par Anthony Michael Hall. Personnage au physique plutôt ingrat (chemise dans le futal, lunettes sur le nez, coupe au bol digne de Lloyd dans Dumb et Dumber), c'est pourtant à lui que nos acolytes demandent de chercher de l'alcool et pour cause: Fogell s'est fait une fausse carte d'identité où il est non seulement citoyen hawaïen (alors qu'il est blanc comme un cachet), mais surtout il s'appelle McLovin. Pas de prénom, juste McLovin. Un élément totalement what the fuck et pourtant cela passe à force d'incompétence et de connerie pures et dures, à l'image de ces deux policiers partageant une bromance encore plus délirante que celle d'Evan et Seth (Rogen et Bill Hader).
Le spectateur peut être subjugué devant tant d'improbable, mais le personnage n'est pas un cliché comme ses deux amis. Il va devenir le roi de la soirée, celui qui aura une réelle heure de gloire alors qu'il n'a rien demandé. Une nette différence et d'autant plus jubilatoire. Il a l'alcool et c'est lui qui va emballer en devenant McLovin, le tombeur hawaïen dont on se souviendra. On évitera de parler des exactions de ses camarades (aussi drôles soient-elles), mais pas des siennes. McLovin apparaît au final comme la vraie vedette du film, le second-rôle qui bouffe l'écran au point que l'on ne retient que lui. Superbad a souvent été caricaturé à une sorte de "nouveau American Pie", pourtant le film s'avère moins potache qu'il n'en a l'air, jouant moins sur le cliché que le film des frères Weitz pour montrer un portrait débridé de personnages atypiques. Sans compter l'attachement certain aux 80's apparaissant dès le générique (superbement pop) et amenant au personnage de McLovin, tout comme la bande-originale où l'on croise notamment Van Halen pour un beau Parama. Un film assez anachronique surtout si on le compare à American Pie qui est très ancrée fin 90's jusque dans ses chansons. Il aurait pu sortir en plein milieu des 80's comme au début des 90's !
Un teen movie ancré dans les 80's que ce soit dans ses thèmes ou son ambiance et où le héros n'est pas forcément celui que l'on croit.