Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Cine Borat
Archives
Cine Borat
  • Sur ce blog, je vous parlerais de cinéma (plus de 2500 films cultes comme navets abominables, ainsi que son actualité), de séries, de bandes dessinés (mangas, comics ou franco-belge), de jeux vidéo et de rock!
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Derniers commentaires
22 juin 2016

Popaul l'aime, il l'adore

Michelle est victime d'un viol qu'elle ne déclare pas à la police. Dès lors, le violeur et la victime vont jouer à un jeu dangereux...

Elle : Affiche

Avant d'évoquer sa carrière dans les grandes largeurs dans sa fameuse Cave, votre cher Borat tenait à aborder le dernier cru de Paul Verhoeven. Même s'il était plus ou moins revenu au cinéma avec Tricked (2012), il s'agissait d'un Direct to DVD fait avec l'aide d'internautes (ils écrivaient le scénario et le réalisateur voyait ce qui lui plaisait ou pas) que Popaul évoque surtout comme "une expérience". Le réalisateur a également vu beaucoup de ses projets partir en fumée, faute de financements (la loi du marché est rude même pour les cadors). Parmi eux, on citera son projet sur Jesus Christ (qui deviendra un livre compilant ses recherches publié en 2015 dans nos contrées) ou la suite du remake de Thomas Crown (John McTiernan, 1999) qui sera finalement remplacé par un nouveau remake (logique hollywoodienne, on s'habitue...). Peu de temps après l'aventure Tricked, le producteur Saïd Ben Saïd (Maps to the stars, Passion) contacte le réalisateur afin d'adapter le roman Oh... (Philippe Djian, 2012). Il est d'abord question d'un tournage aux USA et un casting féminin est donc fait. Il se trouve que les actrices prévues ont répondu par la négative (notamment Julianne Moore et Nicole Kidman), notamment à cause du tempérament du personnage principal. Le film sera finalement tourné en France, en français (ancien résident lors de ses années étudiantes, le réalisateur a dû reprendre quelques notions pour le tournage) et avec des acteurs français.

047505

Dans le rôle titre on retrouve Isabelle Huppert, grande fan du Hollandais Violent depuis Turkish Délices (1973) et intéressée depuis le début du projet. On pouvait avoir peur du côté très français du film, mais finalement on s'en accommode assez rapidement. Cela n'empêche pas la réalisation de Verhoeven d'être constamment en mouvement, évitant les plans fixes dans un montage suffisamment punchy. Les scènes de sexe (avec ou sans plaisir) ont beau être violente, il n'y a pas de nudité. C'est peut être le plus ironique quand on connaît le cinéma de Verhoeven, que ce soit dans sa période hollandaise ou américaine. Prenons la scène du viol. D'un point de vue du montage, ce dernier se révèle rapide, mais suffisamment clair pour que le spectateur comprenne les faits, sans toutefois montrer de sexes. Verhoeven a déjà aborder le viol : dans Spetters (1980) avec une tournente homosexuelle; dans La chair et le sang (1985) avec le viol d'une jeune pucelle; et dans Showgirls (1995) avec une fille agressée par différents hommes. Dans les trois cas, la séquence était plus directe et dégueulasse. Ici, la scène est certes directe, mais est bien moins sale, plus banale. Il ne cherche pas à refaire la même chose. On semble réduire le film à cette scène et pourtant, Verhoeven ne l'utilise même pas pour son ouverture alors que c'est le point de départ du film. Ce sera un flashback, le réalisateur préfèrant d'abord miser sur les conséquences surprenantes de l'acte. 

Elle : Photo Isabelle Huppert

Les autres scènes de sexe seront en revanche directes, mais là non plus pas de nudité frontale. C'est certainement pour cela que Elle a évité l'interdiction aux moins de 16 ans. Même si la nudité n'est pas montrée, les scènes sont suffisament crues pour perdre le spectateur, d'autant plus que le scénariste David Birke et Popaul jouent de manière ambiguë avec le spectateur. Ils ne jugent pas les personnages, quand bien même leurs actes sont plus que répréhensibles ou douteux. Il faut dire que le film ne s'intéresse finalement pas tant au thriller psychologique, au contraire de Basic Instinct (1992) à l'époque. Au final, ce n'est qu'une infime partie du film, d'autant plus que l'on devine rapidement l'identitée du violeur. Elle est avant tout un film de personnages, à la limite de la comédie par moments. Contrairement à d'autres films où l'on a parfois tendance à privilégier certains rôles plutôt que d'autres, Elle décortique chacun de ses personnages avec minutie, ce qui en fait probablement son atout le plus fort. Verhoeven construit une mythologie autour de son héroïne, faisant notamment comprendre petit à petit pourquoi elle n'a finalement pas été à la police et veut jouer avec son violeur. (attention spoilers) Michelle a vu son père tuer la moitié du quartier, engendrant un scandale et une reconstruction certaine. On pense dans un premier temps que le violeur s'attaque à elle à cause de cette affaire (comme beaucoup d'autres au cours du film), finalement ce ne sont que pour des raisons futiles.

Elle : Photo Isabelle Huppert

Finalement, le viol de Michelle apparaît comme un déclencheur: il lui permet d'aller de l'avant, de pardonner, d'avouer ses pêchés (notamment un amant un peu trop concerné) et possiblement les expier par une forme de sexe brutal. Huppert était finalement l'actrice parfaite pour incarner Michelle, sachant être merveilleusement hautaine et impitoyable (ses passages en entreprise sont assez savoureux). Comme évoqué ci-dessus, les différents personnages autour de Michelle sont bien croqués, permettant de comprendre aussi pourquoi elle cherche à s'évader d'un quotidien déprimant, parfois à la limite du surréalisme. Preuve en est toute la sous-intrigue autour du fils (Jonas Bloquet). sorte de grand cadet castré à la fois par sa mère (qui contredit ses choix) et une compagne merveilleusement excessive (géniale Alice Isaaz). Le paroxysme étant atteint lors de la découverte du bébé, valant un fou-rire inévitable. On rigole énormément dans Elle, car derrière ses sujets chocs, Verhoeven réussit à utiliser au maximum un sens de l'humour corrosif salvateur pour faire passer la pilule. La scène du dîner réserve par exemple son lot de moments superbement gênants, à l'image des réunions de famille parfois foireuses. On notera également que Verhoeven laisse une pièce de choix pour Virginie Efira. Comme dans Spetters, Popaul s'attaque à l'église de manière habile. Si dans son précédent film, il évoquait un fanatisme engendrant la violence, dans Elle le personnage d'Efira aurait tendance à être trop pieu au point d'accepter beaucoup de choses inavouables. Un sens du tact qui sied toujours à ravir au réalisateur. (fin des spoilers) Par ailleurs, on pourra saluer la prestation globalement bonne des acteurs, notamment Laurent Laffite bien meilleur quand il ne fait pas des vannes foireuses entre deux cocktails cannois.

Paul Verhoeven signe un film génialement corrosif et pervers, qui ne risque pas de plaire à tout le monde, bien aidé par des acteurs irréprochables.

Publicité
Commentaires
H
Bonjour Borat, bonjour Oliver, bonjour à tous,<br /> <br /> <br /> <br /> Tout à fait d'accord avec toi sur le film. Comme tout le monde (j'ai l'impression) j'ai adoré ce dernier Verhoeven (son meilleur à mon humble avis), notamment pour la manière dont il utilise Huppert, la mettant en face de sa caméra pour des plans qu'il rend iconiques comme celui de la hache ou du chat. Tout le monde est pervers dans ce film (jusqu'à ce chat justement) et le film est justement, à mon sens, une réflexion sur ce que la perversité de jeux vidéos toujours plus violents (il me semble qu'ils sont en effet de plus en plus violent mais si je me trompe dites-le moi parce que je suis un ignare complet en la matière mais entre Mario et GTA il me semble tout de même qu'un certain progrès apparaît) qui finisse non par rendre les personnages violents mais par les rendre insensibles à la perversion, les forçant à aller chercher toujours plus loin dans le "hard" (c'est le cas de Michelle et pas seulement). Le film aborde aussi le thème de la famille, anxiogène, de la famille qui se délite et, pour ma part, la scène du dîner de Noël m'a rappelé Festen, ou presque. Et je n'aurais pas assez de toute la nuit pour dire à quel point Huppert est au sommet !!! Lire son entretien dans les Cahiers du cinéma de juin, c'est excellent.<br /> <br /> <br /> <br /> Un plaisir de passer sur un blog aussi bon et cinéphile. Bonne continuation. <br /> <br /> <br /> <br /> Très vôtre,<br /> <br /> <br /> <br /> HDEF
Répondre
P
Verhoeven ressuscite Chabrol et rient sous cape des travers de nos bourgeois aux moeurs sulfureuses. Un filmqui ne manque pas de jus.
Répondre
A
oui j'avais entendu parler de la bande annonce, peu fiable ou convaincante si j'ai bien compris
Répondre
T
J'avoue que l'annonce de ce projet tourné en France m'a quelque peu surpris et déçu, tant j'espérais que Verhoeven nous signe une œuvre sulfureuse dont il a le secret, choquant ceux qui ne jure que par le pittoyable 50 Nuances De Grey. Bref, un équivalent français à Basic Instinct ou Showgirls, en somme. Mais, j'ai l'impression que le réalisateur s'est considérablement embourgeoisé, comme semble le démontrer la présence d'Isabelle Huppert, que certains désignent comme une belle erreur de casting. Bref, j'espérait voir Virginie Effira à poil, visiblement, c'est raté.
Répondre
B
Oui en effet, peut être pas aussi grand que Black Book, mais un très bon film. Par contre vraisemblablement pas se fier à la bande annonce. Je ne l'ai pas vu avant de voir le film et ce ne serait pas plus mal. ;)
Répondre
Publicité