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Cine Borat
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4 août 2021

Made in France II #8

"Le cinéma français c'est de la merde !", "La la land est inspiré de Jacques Demy tu dis ? Jacques qui ? "... Vous en avez marre d'entendre systématiquement les mêmes reproches envers le cinéma français ? Alors cette rubrique est faites pour vous. Les films français de qualité ne manquent pas, qu'ils soient des 2020's ou des 90's. L'occasion d'évoquer des films français ou réalisés par des français que j'aime à divers degrés ; ou même quelques curiosités qui mériteraient un peu plus de visibilité. En ces temps de pass vaccinal, voici trois films à (re) découvrir !

  • Annette (Leos Carax, 2021)

Annette

Le groupe Sparks et le cinéma est une grande histoire d'amour-haine. C'est ainsi que l'on retrouve les frères Mael sur la bande-originale de Piège à Hong Kong (1998), mais aussi sur une flopée de projets avortés (dont un avec Jacques Tati, un autre avec Tim Burton). Il y a 8 ans, ils se lancent dans Annette, un musical où se rajoute Leos Carax alors auréolé de l'aura d'Holy motors (2012). Mais le projet multiplie les faux-départs, principalement dus à son casting. Adam Driver est annoncé dès 2016, mais sa partenaire se fait attendre. Tout d'abord Rooney Mara, puis Michelle Williams et finalement ce sera Marion Cotillard. Rihanna devait un temps jouer dedans, mais cela ne s'est pas fait non plus. Sans compter des problèmes de planning avec Driver suite à son implication dans la franchise Star Wars entre 2012 et 2019.

Cotillard

Même Carax fut un temps hésitant à cause du portrait du père, ressortant d'une histoire familiale douloureuse (le suicide de sa compagne Katerina Golubeva). Toutefois, il se trouve qu'il aimait beaucoup les chansons des Sparks et c'était également le cas de sa fille Nastya. Cette dernière l'ayant convaincu, il se lance définitivement dans Annette et c'est elle que nous voyons aux côtés de son père dans la salle d'enregistrement lors de l'ouverture du film. Contrairement à d'autres films sortis depuis le déconfinement, Annette est un vrai film de 2021, n'ayant jamais été montré en festivals avant, en dehors des présélections cannoises (où il fut finalement l'ouverture) et bien qu'annoncé à des dates antérieures, il n'a été tourné qu'en 2019. Annette happe dès ses premières minutes avec une ouverture jouant de la mise en abyme sur une chanson entraînante et laissant entrevoir pas mal de choses.

Car oui Annette navigue vers pas mal de sujets sans réel tabou, passant de scènes de sexe gourmandes et croquantes à des morts "poétiques" ou plus brutales, sans compter des thématiques dans l'actualité. Le film a beau avoir été écrit avant l'affaire Weinstein, il n'en reste pas moins que le harcèlement sexuel à Hollywood n'a rien de nouveau. D'autant que Carax s'amuse des chaînes de télévision type E ! Entertainment avec des procédés visuels à peine meilleurs. Des scènes qui apparaissent d'ailleurs comme des transitions de qualité, permettant ainsi de ne pas surexpliquer les enjeux. De même, en plein scandale Free Britney, le film parle d'exploitation de son enfant dans le milieu artistique de manière subtile avec tous les enjeux financiers reposant sur une seule personne ou du moins c'est ce qu'elle pense. Une exploitation grotesque comme le show business en adore.

Driver

Adam Driver signe une prestation sans cesse changeante, passant de vedette adulée à détestée, d'amant transi d'amour à homme abusif, de bon père à exploitant véreux du talent de sa fille. Ce qui en fait un personnage passionnant à suivre, emportant le spectateur vers des virages différents. Le couple Driver / Cotillard fonctionne plutôt bien, entrant en symbiose rapidement (y compris durant l'ouverture). Le personnage de Simon Helberg est peu présent, voire invisible durant une bonne partie du film, avant d'être exploité avec mélancolie pour le bonheur du spectateur. Un second-rôle avant tout, mais qui a une vraie importance dans le film, notamment en ce qui concerne le développement d'Annette. La première vision de la petite fille tient du bizarre pur, au point de croire à une blague à la Twilight ou American Sniper.

Baby

Puis plus le film avance, plus le procédé fonctionne, d'autant plus que les expressions faciales de l'héroïne parviennent à émouvoir le spectateur et à en faire un vrai personnage actif. (attention spoilers) Le procédé de la marionnette est même bien vu, puisque la petite fille est manipulée par son père lors de ses toutes jeunes années et quand les rôles s'inversent, le pantin est remplacé par une jeune actrice particulièrement convaincante face à un Adam Driver épatant et ressemblant beaucoup à Carax en fin de film. (fin des spoilersAnnette est un film tantôt cruel, tantôt très beau, parvenant à évoquer le show business, ses icônes, leur bonheur et leurs problèmes, qu'ils tiennent de la surmédiatisation à leurs travers les plus dangereux. On peut ne pas être fan du parler-chanter, mais les Sparks parviennent à bien retranscrire les pensées des personnages à travers les chansons et la musique plus généralement. Le film annonce dès son ouverture "un conte de chansons et de furie". Leos Carax l'a fait avec ce qui restera l'un des plus beaux films français de cette année.

  • Benedetta (Paul Verhoeven, 2021)

Benedetta

Si Paul Verhoeven n'a pas pu donner sa vision de Jésus de Nazareth (au cinéma du moins), le succès d'Elle (2016) lui a permis de s'attaquer à un phénomène religieux lié au Christ : Benedetta Carlini. En effet, cette dernière se considérait comme la femme du Christ avec les stigmates qui vont avec et des visions du charpentier. Feu Jean-Claude Carrière collabore dans un premier temps avec Verhoeven, avant que son fidèle scénariste Gerard Soeteman ne lui succède. Ce dernier quitte finalement le projet car le Hollandais Violent voulait non seulement évoquer le contexte politique de l'époque, mais aussi l'aspect sexuel puisque Benedetta était également connue pour avoir eu des relations sexuelles avec des novices. Le scénariste d'Elle David Birke se rajoute donc à la fête. L'ironie veut que cet aspect ne soit pas si présent que ça dans le film. En effet, l'aspect purement lesbien apparaît assez tard dans le métrage (le film jouant davantage sur la nudité) et se résume à des scènes certes fortement érotiques, mais pas si sulfureuses.

Gode

 

Donc les spectateurs s'attendant à voir du sexe à foison comme ils en ont l'habitude avec le réalisateur de Basic instinct risquent d'être surpris. En revanche, Benedetta se révèle moins léger dans sa vision de l'Eglise et dézingue tout le monde, de son héroïne aux nonnes, en passant par les hommes d'Eglise. Le cas Benedetta est mystérieux et Verhoeven s'amuse de son ambiguïté. On voit par moments qu'elle est en pleine transe dans des rêves à la limite du kitsch (Jesus n'est pas un doux prince et il aime découpé des serpents) et d'autres où elle semble jouer de certaines situations pour arriver à ses fins en prenant une grosse voix. C'est d'ailleurs ce que dit Charlotte Rampling, ne savant pas quoi penser de son abbesse pas loin de la folie furieuse. Rampling a d'ailleurs un personnage assez fascinant, peut-être plus que Benedetta.

Rampling

 

Une mère supérieure pas dupe, elle aussi fortement ambitieuse et dont la lâcheté comme l'avidité l'amèneront à sa perte. Il en est de même pour Soeur Christina, la seule à réellement remettre en question Benedetta. L'unique face à un Clergé ne voulant rien voir, se contentant du prestige de la situation (les miracles attirent les foules et donc les fidèles et évitent de parler du reste). La chute n'en sera que plus vertigineuse, comme celle du nonce joué par Lambert Wilson, homme dont les excès l'amèneront à un déferlement délirant de souffrances. Des êtres se pensant au dessus de tout, y compris de l'une des maladies les plus ravageuses de tous les temps. Verhoeven fait là une passerelle avec La chair et le sang (1985), film où il traitait de la peste à travers la populace et dont un des rêves de Benedetta fait directement écho au viol de Jennifer Jason Leigh.

Wilson

 

La version religieuse n'est pas plus joyeuse et montre bien que n'importe qui pouvait être touché. Sans compter le système de dot instauré pour les nonnes entrantes par le Clergé, amenant à une certaine "commercialisation" de sa partie féminine. Si Virginie Efira est particulièrement géniale, semblant souvent habitée par son personnage, Rampling signe là une de ses meilleures performances récentes quand Louise Chevillotte est une belle révélation. Benedetta n'est peut-être pas un des films les plus ravageurs de son réalisateur (Elle était beaucoup plus poil à gratter et ne parlons pas de certains opus hollandais et américains), mais il est très intéressant sur ce qu'il montre de l'Eglise et de son époque ; et le portrait de son héroïne est suffisamment croustillant pour s'interroger.

  • Les patriotes (Eric Rochant, 1994)

Les patriotes

Les films d'espionnage n'ont pas manqué durant les 90's, allant de l'apogée de Jack Ryan sous les traits d'Alec Baldwin ou d'Harrison Ford à la résurrection brosnanienne du matricule 007, en passant par les débuts cinématographiques de l'équipe Mission Impossible, la parodie Austin Powers (Jay Roach, 1997) ou le paranoïaque Ennemi d'Etat (Tony Scott, 1998). Et si l'un des meilleurs films d'espionnage de cette période était français ? Le pétaradant Opération corned beef (Jean-Marie Poiré, 1991) ? Non. Nikita (Luc Besson, 1990) et son modèle qui a inspiré aussi bien Hollywood que le cinéma asiatique ? Non. On parle bien des Patriotes d'Eric Rochant. Avant de créer une des séries françaises les plus connues dans le monde (Le bureau des légendes, 2015-), le réalisateur de Möbius se lançait dans cette grosse production Gaumont produite pour l'équivalent de 11 millions d'euros.

Groupe

 

On évoque souvent que les studios français ne soutiennent pas assez leurs projets ambitieux au profit d'autres peut-être plus bankables. Gaumont croyait beaucoup au film de Rochant, au point de déplacer sa sortie de février à juin 1994, suite à de bonnes projections-test en vue de le montrer à Cannes. Manque de bol, l'accueil sera beaucoup moins clairvoyant au festival et le film se paya un sacré bide commercial (321 469 entrées). Le film gagna en réputation au fil du temps et s'avère même projeté aux nouvelles recrues de la DGSE à cause du travail précis de Rochant également scénariste. C'est probablement ce qui a fait bider le film à l'époque comme le suggère son acteur principal Yvan Attal. Selon lui, le film était long (2h22 quand même), noir et lent, à la manière d'un récit de John Le Carré (influence de Rochant).

aFFAIRE

 

Autant dire qu'on était loin de l'équipe de Tom Cruise se faisant dessouder en moins d'une demi-heure ou de James Bond qui défile en char en plein Moscou. Les patriotes n'est pas un film d'action. Les rares moments sales sont glauques et l'interprétation de Sandrine Kiberlain dans l'un d'entre eux est parfaite. Elle semble réellement effrayée par ce qu'elle a vu, loin des espions incarnés par Attal, Bernard Le Coq ou Emmanuelle Devos. Elle était un appât, pas une espionne et cela fait toute la différence. La froideur des agents est palpable, ne semblant s'humaniser que très rarement (cf la relation ambiguë entre Attal et Kiberlain). Ce qui n'empêche jamais d'être captivé par ce qu'ils font, d'autant que le film se base sur deux affaires bien précises s'étant déroulé durant les 80's (l'Opération Opéra et l'affaire Jonathan Pollard).

Kiberlain

 

Evidemment, Rochant ne fait pas des adaptations littérales des affaires en question et il change les noms, mais il est assez précis pour que le spectateur voit la filiation. On voit alors que tout est fait pour que les espions gagnent : sexe avec enregistrements (avec le pauvre Jean-François Stévenin), manipulations, écoutes... Tous les coups sont permis pour arriver à ses fins. "La manipulation est notre métier" dit l'accroche de l'affiche. On ne pouvait pas mieux résumer le sujet de cet excellent film, voyage aussi pertinent que très bien écrit dans l'espionnage israélo-français.

Stévenin

A la prochaine ! 

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Commentaires
S
"Les Patriotes" pas vu depuis trop longtemps... "Annette" a tout du film culte, un sujet fort, une réalisation dantesque, une musique originale énorme avec en prime un groupe que je ne connaissais que de nom... "Benedetta" je suis d'accord, un magnifique film d'un Verhoeven toujours là même si, on est d'accord, ce n'est pas son plus abouti...
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P
Je vois que tu as choisi "Les Patriotes" pour rendre hommage à ce cher Stévenin. Bonne idée, et tu m'as donné envie de le revoir et de me remettre au "Bureau des légendes".<br /> <br /> Quant à "Benedetta", plus je la vois, plus je l'aime cette fiancée du Christ aux airs de sorcière du couvent.
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